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le recueil de textes Kabylo-français
TIGAD-IW   =   Mes élucubrations

  Chroniques
 

Les Arabes disent :  « Lmumen isbeq fi ruhu ! »
                                  (Est croyant qui s'enrichit en premier)
Moi je dis :  « Tous les gens du pouvoir sont des mumnin
                            (Croyants) ! »

 
 

                                                                              A  ma  famille  d'ici  et  de là-bas
 

             Sans oublier, tous ceux qui sont tombés  pour que l'Algérie tienne debout
 
 
 

                                    Préface

« La tombe de mon père n'est plus visible, effacée, aplatie par le va-et-vient incessant des gens qui s'y retrouvaient, tous les jours,  pour enterrer leurs proches et amis ».
      « Le terrorisme » : extrait

 
 Le nom de l'auteur : Mestafa Moussi. Né après l'indépendance, il est l'aîné de neuf enfants, d'une famille originaire de Kabylie.
 Ses espoirs de se voir confier l'animation d'une émission à vocation culturelle, sur la chaîne II  kabyle d'Alger, s'évanouissent, il ne baisse pas les bras et profite de son arrivée en France pour remettre ça. C'est à Radio Tiwizi qu'il fera ses débuts d'animateur tout en poursuivant ses études.

Début 1994, il se retrouve à Radio France-Maghreb, puis, durant l'été de la même année, à Beur FM, qu'il quittera rapidement suite à des dissensions avec la direction, qui lui reprochait de trop se dévouer pour l'identité berbère. Il est recontacté par Radio France-Maghreb, où il ne désarme pas et met tout en œuvre pour que la radio apparaisse comme un outil moderne qui doit servir et contribuer en conséquence  à l'épanouissement de la culture amazighe dans toutes ses formes d'expression. Il impose même une programmation équitable entre le kabyle, l'arabe et le français.

 Ce passage à la radio sera particulièrement enrichissant pour Mestafa Moussi. Pendant qu'il s'adonne à d'autres activités au sein d'associations culturelles berbères, il anime une émission thématique qui lui permettra de faire découvrir de jeunes talents ou de donner la parole à nombre d'artistes-compositeurs plus connus du public.

 Préoccupé par l'identité berbère, Mestafa n'est pas insensible aux violences multiples qui se déchaînent dans son pays. Lors de ses émissions et au gré des événements, il va distiller ces billets satiriques qu'il propose, aujourd'hui, à la publication, accompagnés d'un CD.

 Ce travail, qui gagnerait à être diffusé, vulgarisé et traduit en arabe, présente deux aspects positifs immédiats. Signalons, en premier lieu, que la version  présente, c'est-à-dire française, est une adaptation des billets rédigés dans la langue maternelle de l'auteur : tamazight. La langue de départ est le parler berbère de la Kabylie. Le français apparaît ici comme étant la langue cible. Pour le lecteur non-averti, rappelons que les facteurs socioculturels et le contexte de production sont déterminants dans le message que toute langue se doit et se propose de véhiculer, et de transmettre au patrimoine universel.

 Le second mérite de ce travail est d'émaner d'un Algérien né après l'indépendance du pays. Pour qui connaît suffisamment Mestafa, l'évidence est qu'il n'a nullement pour prétention de se transmuer en Molière ou Boileau des temps modernes. Qu'il soit lui-même un « rescapé » de cette école détournée de sa mission éducative et socialisante ne le met pas à l'abri. Pour lui, Mohamed Boudiaf, un des artisans de l'indépendance, aura été l'inconnu de la jeunesse algérienne. De toute la jeunesse algérienne.

Le style est indigné, fort, pudique et sans complaisance. Il fustige le système de l'État-Parti unique qui, en falsifiant l'histoire du pays, a du même coup décrété que les Algériens devaient revêtir une identité de rechange qui fasse table rase d'un passé riche et pluriel. Un système qui, à travers sa mainmise sur les moyens de socialisation que sont justement l'école, l'université, les médias, le théâtre, le cinéma, la politique familiale, la religion, a fabriqué des citoyens qui ont honte d'eux-mêmes. Qui oserait s'affirmer, aujourd'hui, en Algérie, fils ou fille de paysan ? Mestafa le revendique haut et fort. « Les enfants de la paysannerie algérienne, c'est moi, c'est vous », écrit-il. Voilà qui va faire plaisir à Fanny Colonna, qui regrettait encore récemment que la paysannerie, son histoire, ses valeurs, et leur place dans l'histoire de la nation et de la société algériennes ne soient plus au cœur des préoccupations actuelles en Algérie.  Il faut même penser, poursuit-elle, qu'on regrettera plus vivement encore bientôt cette situation.

Dans ce pays où l'on  bute, en effet, facilement des hommes et des femmes d'envergure comme Tahar Djaout, Nabila Djahnine ou Matoub Lounès pour seulement 300 francs, ceux qui semblent incarner désormais les valeurs  « respectables » sont ceux qui ont assez de veine pour manger à tous les râteliers. Ce sont les khobzistes, pour reprendre le terme qui les désigne, celui consacré par la vox populi. Ils détiennent les rênes du pouvoir, ils spéculent sur la devise et s'abritent derrière l'islam pour mieux asservir la jeunesse algérienne à laquelle ils font miroiter, tout à la fois, le paradis, le rêve de Taïwan, celui de la Turquie, de Barcelone ou de Rome,  pendant que leurs enfants sont scolarisés dans les meilleurs établissements privés de Londres,  de Paris ou de Tunis. Autrement dit, devenir trafiquant ou mourir.

Mais que la responsabilité des régimes politiques qui se sont succédé en Algérie depuis l'indépendance, dans la débâcle actuelle, soit clairement établie, ne dédouane pas le moins du monde les opposants de la leur.

Qu'il s'agisse des Islamistes ou des Berbéristes, la rupture avec les pratiques du pouvoir, propres à l'ère du Parti unique, ne semble pas pour demain. Regardez, avertit Mestafa, ce qu'ils font encore des enfants de ce pays et prenez garde à ce que ces derniers ne deviennent pour longtemps, entre leurs mains, les otages de la confrontation idéologique et un enjeu de pouvoir.

Du trabendo à l'instrumentalisation de l'enfance, des non-dits aux relations au sein de la famille, des rapports hommes-femmes, il ressort de ces billets une préoccupation réelle quant aux tensions qui traversent la société algérienne, d'essence musulmane, et encore très profondément marquée par les représentations patriarcales caractéristiques des pays du Sud et, il n'y a pas longtemps encore, du Nord de la  Méditerranée.

Enfin, comment ne pas être attentif au sort des Algériens établis en France, quand on est soi-même enfant d'un père anciennement émigré, qu'on a, à peine croisé  dans sa vie parce qu'il fallait partir au moment où, lui, rentrait vivre sa retraite au pays ?

Chez Mestafa, c'est le sentiment de révolte qui l'emporte face à la manière dont sont rendus les événements en Algérie, par les médias français. L'on sait les relations entre la France et l'Algérie encore passionnelles et tendues. Mais comment se laisser traiter, résignés, de délinquants notoires, laisser faire la dérive raciste quand on est près d'un million  de citoyens à s'acquitter annuellement de ses impôts, à créer des richesses dans le pays d'accueil et  à servir de passerelle aux échanges multiples entre les deux rives de la Méditerranée ?

 Mais, incontestablement, c'est l'Algérie qui doit se sentir, au premier chef, concernée, à travers ses représentations diplomatiques, par le sort réservé à ses ressortissants à l'étranger. Qu'il s'agisse des réservations auprès des compagnies nationales de transports aérien et maritime (Air Algérie et EMTV), du droit à l'information, à la prise de parole, les Algériens établis à l'étranger ont, d'abord et avant tout,  le droit aux égards  et à la considération de leur propre patrie. Ils ont d'abord le droit au respect de ceux et celles qui sollicitent leur suffrage à l'occasion des échéances électorales.

 Si, à lire et à entendre ce jeune Algérien qui surfe sur Internet  aussi aisément qu'il compose, on distingue, au premier abord, un sentiment quelque peu désabusé et sans trop d'illusions, toute la trame de ses billets laisse entrevoir, paradoxalement,  un immense espoir et une invitation constante à l'humilité, à la générosité, au respect, à la solidarité, à l'innovation, au dialogue, à un  retour ou à l'attachement aux valeurs qui fondent la société algérienne. En écrivant cela, on ne peut s'empêcher de repenser à ces paroles prononcées par Malika Matoub, lors de l'hommage rendu à son frère assassiné : « Mon père a planté un figuier dans notre jardin. Ma mère l'a greffé et l'a fait grandir. Lors de l'enterrement de Lounès, aucune feuille n'est tombée, aucune branche n'a été cassée. J'ai été frappée par l'extraordinaire civisme de notre jeunesse… ». Voilà de quoi croire en l'avenir de l'Algérie. Encore faudrait-il que les dirigeants de ce pays cessent de jouer aux idéologues véreux et redonnent la parole à cette jeunesse, car, après tout, il y va de son avenir. C'était là tout le message de Mestafa. A bon entendeur…

 

      Fatima. BELKACEMI.
      Juillet 1998

 
 


Le terrorisme

 La tombe de mon père n'est plus visible, effacée, aplatie par le va-et-vient incessant des gens qui s'y retrouvaient tous

les jours pour enterrer proches et amis.
 Las, des larmes qui ne me rapportent rien.

 Las, de crier dans le vide, comme si c'était dans un cauchemar. Crier pour moi-même, sans que personne ne m'entende.

 Las de me dire que, peut-être, il y aura un changement puisque ce ne sont pas une ou deux personnes qu'on a enterrées.

 Las de lire les journaux, pensant y trouver de bonnes nouvelles alors que les unes étaient écrites de sang.

 Las d'espérer le retour des jours où la nuit est noire1 et où nous dormirons comme nous dormions auparavant.

 Las de me mentir, d'essayer de me convaincre que, pendant la nuit, ce sont des loups que j'entends, non pas des armes.

 Las d'espérer que ce qui se passe chez nous n'est qu'éphémère, que, bientôt, les portes de la paix s'ouvriront.
 Las d'attendre l'intervention du Président, qui va nous dire :

 « Tout cela est facile, le bout de la crise est entre mes mains ! » Sauf que ce bout lui a filé entre les doigts !

 Las, las, las…

Tous mes efforts pour retrouver la tombe de mon père sont restés vains.

Ceux qui étaient là hier n'y sont plus aujourd'hui, ils sont allés là-haut dans le ciel, où règne la paix.

 

 


Faut-il sacrifier sa vie…

 Said Mekbel, journaliste au quotidien algérien Le Matin, juste avant son assassinat, avait déclaré lors d'une interview sur Arte :
« Mieux vaut que je sois vivant pour mon pays que de lui être mort. »

Qui n'a pas voulu vivre pour son pays ?

Sinon celui qui l'a escroqué, et qui voudrait bien lui survivre pour le ruiner davantage.

Qui voudrait se sacrifier pour son pays ?

Sinon celui qui le porte dans son cœur.

Celui qui le déteste aussi. Celui-là pourra bien mourir pour lui, en kamikaze, pour le détruire.

Faut-il penser que Saïd n'aime pas son pays parce qu'il rejette l'idée de lui être mort ou bien doit-on dire qu'il l'aime du fait qu'il préfère lui rester vivant ? Peut-être a-t-il raison de ne pas se sacrifier pour lui, comme l'ont si bien fait ses aïeux, qui regrettent certainement aujourd'hui leurs gestes, vu que l'indépendance et la liberté qu'ils ont arrachées par leur sang, seule une partie du peuple en a bénéficié !

Peut-être, aussi, a-t-il raison de penser à lui rester vivant, car s'il existe des centaines et des centaines de gens comme lui, le pays n'aura aucune difficulté à rejoindre rapidement le sommet du progrès.

Alors, le pays restera-t-il debout grâce à ceux qui payent de leur vie la liberté ou est-ce grâce à ceux qui lui sont encore vivants qu'il ne tombera jamais ?

 
 


Un boycott maquillé !

      L'Irak, l'Iran et la Libye connaissent tous les conséquences du boycott international. Pas de liaisons aériennes ni maritimes, pas de médicaments ni de nourriture, pas d'échanges commerciaux, dans les deux sens. Cette décision, comme d'hab, émane, bien sûr, du seul maître de la planète : les USA.
      Les États-Unis, quand ils veulent ruiner un pays, c'est chose facile, il suffit juste qu'ils soulèvent le chapeau et hop ! Une loi que le reste du monde doit appliquer.

Tous les États souverains, excepté : l'Algérie, Cuba, l'Irak, l'Iran et la Libye,  suivent tous, et à la lettre SVP, l'ordre de l'Amérique,  ils sont comme la queue du coq, elle va où le vent l'oriente. Ils ont accepté de mettre fin à toutes leurs activités avec les pays dits terroristes ou dictateurs.

       Si l'Iran, l'Irak ou la Libye s'étaient attaqués aux avions civils ou aux pays souverains, la punition pourrait s'expliquer, mais, à ce que je sache, l'Algérie n'a ni descendu d'avions ni occupé des territoires. Mais comme c'est un État qui n'a jamais baissé les yeux devant ces superpuissances, alors, on a trouvé une excuse : le terrorisme qui secoue le pays. Au lieu de l'aider à éradiquer ce mal, puisque c'est ce que veulent ces puissances ?à en croire leurs slogans?, elles ont préféré annuler toute liaison aérienne avec l'Algérie.

N'est-ce pas là une autre forme de boycott ?

Aussi, pour qu'Air Algérie ne se rende sous aucun prétexte en Libye ou en Irak, l'aviation  internationale a, à son tour, sorti de son chapeau une autre loi, qui interdit à toute compagnie dont les appareils ne sont pas équipés de puces « délatrices »  de survoler le Maghreb, l'Orient et l'Europe, afin de s'assurer qu'aucun appareil ne se rendra dans ces pays condamnés par les États-Unis.

En vérité, c'est l'Algérie qui a été visée. Minimiser le plus possible ses activités aériennes avec ses pays frères.

La compagnie Air Algérie s'est, de ce fait, pliée aux exigences de cette association internationale et comme elle ne dispose que de cinq appareils, fort heureusement équipés de ladite puce, on voit mal comment elle pourrait assurer l'acheminement, en cette période de vacances, de cinquante mille Algériens, au minimum, résidant en France !

Cinq appareils pour cinquante mille personnes. Un avion pour dix mille passagers.

Si chaque appareil peut contenir trois cents places, il doit faire trente-trois voyages en trente jours ou tout simplement trente voyages en trente jours, si les mille personnes restantes acceptent de voyager debout, comme il nous est arrivé de le constater !

C'est ce que l'on appelle un boycott  maquillé !

 
 


Le printemps berbère

             Qui n'aime pas le printemps ? Qui déteste les fleurs, la verdure du sol et le bleu du ciel ? Personne, à ma connaissance !
Nous, les Berbères, le printemps, nous l'aimons doublement !

Primo, comme l'aiment tous les êtres sur terre, et secundo, parce qu'il nous a réunis dans notre combat pour la cause berbère.

Cela fait des années maintenant que des villages tout entiers se sont déversés dans les rues, des progénitures se sont rencontrées, ont crié, pleuré ensemble (elles sont habituées). Même les jeunes filles ont été touchées dans leur honneur. Malgré cet extraordinaire soulèvement populaire, les autorités ont fait la sourde oreille face aux revendications du peuple opprimé. Leurs yeux, en revanche, ils les ont grand ouverts ! Pas, malheureusement pour donner suite à nos revendications, mais pour bien toucher leurs cibles avec les matraques des CRS. Ils ont vu mais n'ont rien entendu !

Depuis l'apparition du terrorisme et le boycott de l'école durant une année entière, ces chefs ont à peine tendu l'oreille, quel ange les a persuadés ?

Aujourd'hui, ils se rappellent l'amazighité du pays ! Que cachent-ils derrière cette subite reconnaissance, eux qui pensaient d'abord et à chaque fois à la paix avant l'identité ?

Bonne ou mauvaise initiative, à chacun sa conclusion ! Chacun repère sa Qebla où il pense bon. C'est la raison pour laquelle des divergences de vue sont apparues au grand jour parmi les hommes de lettres et du verbe. Pas d'entente entre eux, mais pour les coups bas, si ! Ces derniers ont perdu là où les autorités ont réussi à savoir diviser pour régner.

Mésentente aussi entre les partis (RCD-FFS). Chaque parti(e) accuse l'autre d'être le bras droit des autorités et se proclame porte-parole du peuple berbère et seul(e) capable de résoudre le problème. Ils ne manifestent pas ensemble, ils rejettent l'union… Ils ne veulent pas de tamazight ! Si c'est faux, prouvez-nous donc le contraire, messieurs les décideurs !

Tamazight que nous souhaitions propager sur tout le territoire algérien, aujourd'hui, elle n'a même pas osé pointer le bout de son nez devant le seuil de nos portes !

Les perdants, dans tout cela, c'est bien nous, les pauvres et notre progéniture ; elle, qui a perdu une année scolaire pendant que les enfants de ceux qui se battent pour le leadership suivent leurs études dans les départements arabophones, si ce n'est pas de l'autre côté de la Méditerranée ! Le printemps est beau avec des fleurs fraîches, pas avec des fanées !  Où en est « Tamazight à l'école » ?

 


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